L’industrie de la volaille a évalué avec diligence l’utilisation de divers additifs alimentaires, dont les probiotiques, les prébiotiques, les acides organiques et les huiles essentielles, comme substituts potentiels à de faibles doses d’antibiotiques promoteurs de croissance (APC) pour préserver la santé de l’intestin et l’équilibre du microbiote intestinal et améliorer les performances de croissance. Les résultats des recherches sur l’effet et l’efficacité des solutions de rechange aux APC sur le microbiote des poulets sont quelque peu incohérents, ce qui peut être attribuable aux limites de l’administration dans l’alimentation et dans l’eau. Plusieurs facteurs peuvent modifier le profil du microbiote intestinal, bien que la nutrition (ce qui comprend le type d’alimentation et le moment du repas) soit considérée comme le principal facteur d’influence. Des études suggèrent également que le microbiote pourrait varier en fonction du segment de l’intestin grêle examiné.
Les micro-organismes qui peuplent l’intestin des volailles sont connus pour jouer un rôle essentiel dans la croissance et la santé de l’oiseau. Or, la génétique joue également un rôle important dans la santé globale. L’épigénétique est l’étude de la manière dont les comportements et l’environnement altèrent le fonctionnement de gènes spécifiques. Nos gènes encodent les protéines et ces dernières déterminent le fonctionnement d’une cellule en particulier. Les protéines sont contrôlées par la disponibilité de certains nutriments et ont donc un impact sur l’expression des gènes. Le sexe a également une influence sur l’épigénétique (O’Connor et. coll. 2014).
Des chercheurs ont démontré que les huiles essentielles modifient le microbiote et influencent l’expression de plusieurs gènes qui participent à la synthèse et au dépôt des graisses ainsi qu’à l’activité antioxydante (Sabino et. coll. 2018).
Cette étude visait à évaluer l’effet de l’administration d’un mélange commercial d’huiles essentielles contenant des phytonutriments d’anis étoilé, de cannelle, de romarin et de thym (par différentes voies) sur le microbiote iléal et cæcal des poulets de chair et sur le transcriptome (ARN) du foie, en comparaison avec un antibiotique promoteur de croissance.
Les résultats de cette étude seront utiles aux entreprises de santé animale qui cherchent à développer des produits probiotiques précis (désormais appelés « biotiques de précision ») garantissant une meilleure performance de croissance dans la production de poulets de chair. Toutes les bactéries intestinales bénéfiques identifiées (individuellement ou combinées) dans cette étude pourraient être commercialisées sous forme de mélanges probiotiques. Cette étude fournit également aux généticiens de la volaille des informations précises sur le patrimoine génétique afin de faciliter la sélection génétique de poulets de chair plus performants.
Au total, 576 œufs de poulets de chair reproducteurs Cobb 500 âgés de 41 semaines ont été incubés dans un incubateur Chick Master à une étape. Au 18e jour, 288 œufs ont été sélectionnés au hasard pour constituer le groupe sans injection; 96 œufs ont été choisis au hasard pour former le groupe in ovo – saline, qui a reçu injection de 0,2 ml de solution saline physiologique, et 192 œufs ont été choisis au hasard pour former le groupe in ovo – huiles essentielles et ont reçu 0,2 ml d’un mélange de solution saline et d’huile essentielle à un taux de dilution de 2:1. L’huile essentielle utilisée dans cette étude est un mélange commercial (Probiotech International inc., Saint-Hyacinthe, QC, Canada) contenant des phytonutriments d’anis étoilé, de cannelle, de romarin et de thym.
À l’éclosion, les poussins du groupe initial sans injection ont été répartis au hasard dans 3 nouveaux groupes de traitement : (A) poussins nourris avec un régime basal de maïs, de farine de soja et de blé (traitement en contrôle négatif, CN); (B) poussins nourris avec CN + 0,05 % de bacitracine disalicylate de méthylène (antibiotiques dans l’alimentation); (C) poussins recevant le même mélange commercial d’huiles essentielles que celui décrit précédemment par voie hydrique à la dose recommandée de 250 mL/1000 L d’eau potable. Les groupes in ovo – saline et in ovo – huile essentielle ont été placés sous le régime de contrôle pour former les traitements (D) et (E) respectivement. Le dernier groupe de traitement, (F), était composé de poussins du groupe de traitement in ovo – huile essentielle, aussi alimentés en huile essentielle par voie hydrique. Chaque groupe de traitement comptait 48 oiseaux.
Au jour 21, 8 oiseaux par traitement ont été sélectionnés au hasard, pesés et euthanasiés. Des échantillons d’intestin grêle ont été prélevés. Au jour 28, 16 oiseaux par traitement ont été sélectionnés au hasard, pesés et euthanasiés. Le contenu digestif des cæcums a été extrait pour l’analyse des acides gras à chaîne courte. Des tissus hépatiques et de l’ADN ont été extraits des deux échantillons d’intestin grêle. Les échantillons d’intestin ont également été analysés pour déterminer la diversité du microbiome.
Cette étude a révélé que si les traitements n’ont produit aucune différence dans la diversité des bactéries, des différences claires ont été enregistrées dans la distribution et la structure du microbiote dans l’intestin grêle. En outre, si plusieurs études ont émis l’hypothèse que les antibiotiques amélioraient la croissance des poulets de chair en modulant la composition de l’intestin, cette étude présente une perspective importante sur la manière dont ils agissent. Cette étude révèle que les antibiotiques augmentent la proportion de certaines bactéries (Eisenbergiella, Lachnoclostridium et Shuttleworthia), qui sont toutes liées à une amélioration de la prise de poids et de l’indice de conversion alimentaire chez les poulets de chair. Par ailleurs, l’étude fournit des preuves préliminaires que les antibiotiques et les huiles essentielles peuvent agir différemment chez les poulets de chair mâles et femelles, en fonction des ensembles de gènes précis activés. Les antibiotiques pourraient améliorer la croissance des poulets de chair mâles en activant les gènes liés à un meilleur transport des nutriments. Les huiles essentielles pourraient également renforcer l’immunité chez les poulets de chair femelles en activant des gènes liés à l’immunité.
Chercheurs et collaborateurs
Samson Oladokun, K. Fraser Clark, Deborah Adewole, Probiotech International inc.
Financement et soutien
Chicken Farmers of Nova Scotia, Partenariat canadien pour l’agriculture – Initiative de recherche et d’innovation pour l’agriculture, Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada
Références
O’Connor, C. et J. Adams. 2014. Essentials of Cell Biology. https://www.nature.com/scitable/ebooks/essential s-of-cell-biology-14749010/122996928/
Sabino et coll., Oregano dietary supplementation modifies the liver transcriptome profile in broilers: RNASeq analysis. Res. Veter. Sci. 2018, 117, p. 85 à 91.
La publication complète de ces travaux est disponible en ligne.
Adapté de l’ Atlantic Poultry Research Institute’s Factsheets
CP 550 Truro, NS B2N 5E3 (902) 893-6657
Laurie.Eagles@dal.ca www.APRinstitute.ca